L’Homme planétaire : empathie et/ou barbarie ?

 L’homme planétaire serait-il celui de la globalisation et de la mondialisation ? Nous ferait-il buter alors sur une visée exponentielle de l’homme ? Or, il n’est cependant ni l’homme universel, ni l’homme générique.

Fait de contradictions et d’oppositions, très prégnantes dans sa structuration avec la planète-terre, il est l’homme que nous ne cessons de fabriquer par nos théories, réflexions et concepts. L’homme planétaire se pense localement, au quotidien et il est en même temps inséré dans la planète.Confronté au négatif, «à sa fin du mois et la fin du monde », il a pris conscience que la planète peut mourir avec nous. De ce traumatisme, il se défend par l’archaïque, le repli, le vital et la violence. Se sentant touché au vital, le peuple ne trouve pas dans les politiques gouvernementales des réponses adaptées à ses souffrances. Faudrait-il alors envisager l’homme planétaire à partir de la sortie du capitalisme ? Comment celle-ci pourrait-elle se faire ? Selon André Gorz, elle se fera d’une façon civilisée ou alors d’une façon barbare !

L’homme planétaire n’est pas fait uniquement d’algorithmes,mais aussi de chair, celle du monde du sensible et de l’émotionnel. Il s’inscrit alors dans un nouveau rapport avec la nature qui ne serait ni objet ni sujet. Ce qui est visé, c’est sa part inconstructible, sauvage, rebelle et où le politique cède la place à l’apolitique (le hors politique) en soi et dans le monde. Cette posture fait appel à l’autonomie du sujet, à sa réflexivité et son irréductible singularité. L’écologie est ainsi devenue comme inséparable d’une perspective de rapports sociaux.

A l’opposé d’une société autocentrée sur la croissance pour la croissance, l’écologie et, avec elle, l’écoféminisme nous rapprocheraient de la notion « d’être en commun ». Selon J.-L. Nancy et R. Esposito, «l’être-en-commun » est toujours traversé par une précarité ou une négativité qui nous est commune, nous dépossède en partie de nous-mêmes. Ce négatif nous empêcherait d’être alors des sujets isolés, autosuffisants ou souverains.

Le vivre-en-commun transforme l’organisation interne du sujet, marqué par la finitude, le négatif et tout ce que nous ne pouvons pas choisir. Ceci nous amène à mettre en pensée « l’étrangéité » en nous où des brèches et des espaces s’ouvrent rendant possible des relations. Celles-ci s’organisent autour d’une pensée et d’une action partagée et non d’un idéal entre nous. Penser dans le sens de la mise en pensée est donc nécessaire pour lutter contre toutes les impositions qui sont au cœur des démocraties libérales et des régimes autoritaires. Penser dans l’écart, l’altérité, dans un monde de la discontinuité où l’homme planétaire doit se réinventer sans cesse ! Nous avons à nous interroger sur les influences culturelles réciproques, les ressources culturelles. Selon F. Jullien, le « Commun des ressources » c’est celui de la langue, de l’histoire, des modèles transmis par l’éducation, des références culturelles et les formes de vie.

Et l’art, ce passeur privilégié entre les cultures nous permet aussi de prendre en compte l’irrationnel nécessaire à la constitution du sujet dans le monde.

Marie-Laure Dimon